Nakï
par Yannick

Yannick : Nakï bonjour, ça va bien ?

Nakï : Oui, ça va très bien !

Y : Peux-tu me faire une petite présentation de ta personne ?

N : Comme présentation je te dirais simplement que je viens du Nord du Québec, le Saguenay (c’est le seul fjord de l’Amérique), une petite ville qui s’appelle Chicoutimi, et surtout le village Falardeau... et là c’est le dernier dépanneur !
Sinon, après c’est le bois et puis les avions pour aller dans les zones d’exploitations contrôlées, qu’on appelle chez nous "les zones de chasse et de pêche". C’est une place extraordinaire, majestueuse.
Mais je suis prêt pour vivre à Montréal, qui est une ville où il y a beaucoup de béton (!!).
Ce n’est pas extraordinaire mais partout, de toute façon, il y a des gens super ; et partout il y a des cons aussi !

Y : C’est vrai, c’est comme partout ! Alors, parles-moi de ton parcours musical. Comment es-tu "tombé" dans la musique ?

N : Vers l’âge de 4/5 ans je montais des trucs avec des boîtes de chaussures, des boîtes de mouchoirs, avec des élastiques et puis je passais des heures à jouer là-dessus !!
Après, première guitare à 8/9 ans, et vers 10/11 ans je montais des spectacles derrière chez moi, je faisais des concerts et c’était 10 cents par personne (rires !). C’était à la bonne franquette, et c’est comme ça que je me suis aperçu que c’est ce que je voulais vraiment faire.

Y : Et comment t’es venu l’idée de ton instrument, le Stickharp ?

N : Vers 18 ans, je suis arrivé à Montréal. Sur la route, le camion de déménagement à pris feu et on a tout perdu : les meubles, mes instruments, tout a brûlé !
Alors je me suis demandé ce que je pouvais faire avec mes 2 mains. La basse, l’accompagnement, la mélodie...
Et puis je voulais un instrument à cordes avec un registre large comme un piano, de la plus basse jusqu’au sur-aigu. _ Et aussi un instrument qui avait 3 sortes de cordes : le nylon, le métal, et la soie filée d’acier.
J’ai donc à nouveau rencontré le luthier Yvon Robert qui m’avait déjà fabriqué une double manche basse/mandoline sur laquelle j’avais déjà travaillé les exercices de polyrythmie avant même de savoir que le Chapman Stick existait. J’avais eu des échos mais j’en n’avais jamais eu un entre les mains.
J’ai essayé avant de me lancer dans le projet "Stickharp" mais ça ne me convenait pas. Et puis ce projet a été un coup de cœur.
C’était un véritable défi pour lui et pour moi aussi.
On a pris 2 ans pour le construire : étude de physique acoustique, il fallait étudier chaque bois en fonctions des tensions que ça allait donner. Il y a 37 cordes (11 cordes de métal sur le manche, 22 cordes de nylon sur la harpe, et les 4 cordes de soie filées d’acier pour le Tânpûra).
C’était vraiment un défi pour faire un instrument qui tienne la route. Et là ça fait 15 ans que je suis dessus !

Y : Et au niveau de l’amplification ?

N : C’est des capteurs piezzos. Il y a 7 piezzos plus un grand pick-up (micro) magnétique.
La Harpe est séparée en 3 capteurs différents : les basses, les cordes moyennes, et les hautes.
Le Tânpûra a 1 piezzo pour lui.
Pour le manche il y a donc un pick-up magnétique et 3 piezzos répartis pour bien définir et séparer les canaux comme la guitare et la basse afin de traiter le son séparément. Je peux mettre un compresseur sur la partie Basse, une WhaWha sur la partie Guitare, de l’écho sur la section Harpe...

Y : Et comment c’est accordé tout ça ?

N : Le manche est accordé en "open tunning" Sib ; 11 cordes de la note la plus grave à la plus aiguë. Au début c’est comme une Basse 5 cordes où le Si grave est descendu au La grave, puis 6 cordes pour la partie Guitare.
La différence avec la plupart des tapes c’est que je peux "jouer cordes à vide" ; au lieu de couper la résonance, moi je m’en sers. Je peux jouer comme sur une guitare aussi.
La Harpe est en diatonique Sib.
Le Tânpûrâ : Sib, Fa, Fa, Fa à trois octaves. C’est joué "cordes à vide" mais Je peux aussi jouer les harmoniques des cordes. Ce qui fait le son du Tânpûra c’est un morceau d’ivoire légèrement incliné que je peux moduler pour faire varier la friction avec les cordes. J’accentue l’effet avec une wahwah.

Y : Et alors ton CD ?! C’est très difficile de se le procurer ! J’habite au Nord de Paris et j’ai fini par le trouver et le commander dans un magasin de Bordeaux !

N : C’est la troisième fois que je viens jouer en France (1993 à Angoulême, une tournée en 2000 dans les environs de Bordeaux, en Aquitaine, en Lozère, à Bayonne, l’Ile d’Oléron...).
En fait on n’a pas de distributeurs européens. C’est pour ça que depuis 1 semaine que je suis arrivé, on cherche vraiment à signer avec un bon distributeur, et puis aussi un label qui pourrait être intéressé. D’autant que le deuxième album je voudrais qu’il soit au minimum en trio, avec le Stickharp, des percussions (tabla, batterie jouée avec les mains...), et un saxo qui fasse du ténor, du soprano. Mélanger ces sonorités-là, c’est vraiment super.

Y : Tu joues toujours tout seul ou bien tu as des projets en groupe ? On m’a parlé d’un Big-Band...

N : Je ne peux pas le cacher, ça fait plusieurs années que je travail là-dessus ; c’est mon projet orchestral symphonique, Stickharp et Orchestre.
J’ai déjà monté toutes les ouvertures (LES ouvertures !! Ce n’est pas UNE ouverture !). C’est un truc pour 56 musiciens et moi comme soliste. Il y a des picolos, flûtes, hautbois, clarinettes, clarinettes basses, bassons, contre-bassons, trompettes, trombones, trombones basses, cors français, violons, altos, violoncelles, contrebasses, percussions.

Y : Comment s’est passée ta semaine en France depuis ton arrivée ?

N : On a enregistré un documentaire et c’est passé 2 fois dans la semaine sur M6, dans le Morning Live. En fait il avait juste était diffusé dans la région de la Gironde, et puis le mec qui avait fait le reportage avait vraiment aimé l’idée de mon instrument. Il a envoyé la K7 à Paris et c’est comme ça que ça a été diffusé 2 fois à l’antenne nationale.
On a fait le forum FNAC à Bordeaux (ça faisait la 3ème fois que je venais).
J’ai fait un Master-Class à "Rock & Chanson", à Talence, et un concert le soir.

Y : Et sinon, tu te produis internationalement ?

N : Bah, c’est drôle, c’est surtout les Français ; depuis que je connais mon agent, Manu de Art Session en France, ça l’a bougé.
Mais j’ai fait le festival Womad en Italie.
J’ai joué à New-York, à Philadelphie, un peu partout au Canada, à Toronto, à Montréal.
J’ai 300 concerts de solo avec le Stickharp.

Y : Comment décris-tu ton instrument ?

N : En réalité l’instrument c’est un outil, il ne faut jamais oublier ça. C’est la musique qui est importante. Quand tu joue avec n’importe quoi, une batte de base-ball avec une corde à linge dessus, si t’es capable de faire de la musique avec, c’est ce qui compte.

Y : Une batte de Base-Ball avec une corde à linge... c’est le genre d’instrument que tu bricolais ?

N : La première basse que j’ai montée, j’avais juste un corps de vielle Fender Precision et j’avais mis un manche en cèdres (un bois mou !), taillé au couteau, avec une plaque de touche qui était un dessus de comptoir. Et j’ai fais du Big-Band avec ça ! (Rires !!)

Y : Et alors, ton avis sur ces 2ème Rencontres de Tape-Guitare, ici à Allaire ?

N : Je vais te dire franchement ; en premier les gens du festival sont extraordinaires. J’ai rarement vu des gens aussi accueillants, qui savent de quoi ils parlent comme Youenn, Alain. C’est eux qui sont venus me voir à Bordeaux il y a 2 ans. Et puis Vincent ! Wouah ! C’est vraiment des êtres que je considère exceptionnels. Et tous les gens autour aussi bien sur.
Et le Festival en tant que tel, moi je trouve ça absolument génial et je suis convaincu que si la planète avait plus de truc comme ça, ça irait mieux.

Y : Je suis d’accord. Je suis venu l’année dernière et vraiment j’ai été bien reçu. Ils ne me connaissaient pas et ils m’ont accueillis, on est bien nourri (merci Bruno !), on est dorloté, on est chouchouté, c’est vraiment bien.

N : Ahh oui j’te dis, la Bretagne ce n’est certainement pas la dernière fois que je viens y faire un tour. Et même chez les gens où on a été accueillis parce que ce n’est pas évident : tu débarques de X et t’arrives chez des gens, t’es hébergés. Ces gens-là ils sont fabuleux (Didier et Michelle).

Yannick : Nakï, je te re-merci d’avoir répondu à mes questions. A bientôt j’espère.

Nakï : J’espère aussi. Et ça m’a fait plaisir de m’entretenir avec toi.
Bonne continuation pour ton site.





Pour plus d’informations sur Nakï et son instrument :
www.NakiMuzik.com

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